François Xavier
Le lieu semblait pourtant parfait. Une chapelle en grès rose des Vosges, entourée de vignes, dans un petit village alsacien typique sur les hauteurs de Colmar. « C’était très mignon », se souvient Cédric* à propos de l’endroit où son grand-père est enterré en cette fin de mois d’août 2024.
Le père de sa mère souhaitait reposer dans le caveau familial, auprès de ses parents et de son épouse, décédée douze ans plus tôt. La mise en terre du cercueil n’étant pas possible du fait de tombes trop proches, deux agents communaux ont déjà creusé un trou et attendent en buvant une canette de thé glacé que la cérémonie se termine. Cédric remarque alors que dans le tas de terre, se trouvent des morceaux de bois. Et le tout est recouvert d’une bâche. Cela l’intrigue mais il se reconcentre sur la voix du prêtre rendant hommage à son grand-père, près du cercueil posé à une vingtaine de mètres du trou.
« J’ai senti le scandale arrivé »
A la fin de la cérémonie, un orage de fin d’été avec de grosses bourrasques survient. La bâche s’envole et les deux agents, paniqués, lui courent après. « C’est là que j’ai remarqué, dans le tas de terre, un bras momifié dont les doigts pointaient droit vers le ciel, entouré d’un tissu bleu. Je me suis dit qu’ils avaient trop creusé ». Cédric comprend que les morceaux de bois sont ceux d’un cercueil du caveau, et le bras, celui d’un de ses ancêtres.
Le quadragénaire a à peine le temps d’y réfléchir qu’une pluie intense commence à tomber sur le cimetière. Cédric saisit sa tante, très affectée, par le bras. Mais cette dernière tourne la tête, observe l’amas, et lui lance « pourquoi il y a la robe de maman dans le tas de terre ? » « Ma tante étant corse et ayant un gros caractère, j’ai senti le scandale arrivé. Je me suis dit qu’il fallait absolument qu’on parte sinon elle allait commencer à engueuler tout le monde et ça pouvait partir en sucette. »
« L’orage m’a sauvé la vie »
Cédric agrippe donc la sœur de sa mère et part se réfugier dans un restaurant voisin. « Elle n’a pas réalisé ce qu’il s’était passé, l’orage m’a clairement sauvé la vie », rigole-t-il un an après. Le quadragénaire ne parlera de cet épisode à aucun membre de sa famille. « Ma mère était très proche de ma grand-mère, donc je ne lui ai pas dit pour la préserver. »
Il assure ne pas avoir été traumatisé par cette vision. « J’aimais ma grand-mère mais je ne suis pas croyant, donc je n’ai pas été choqué. Et puis, l’erreur est humaine. » Une question lui reste cependant en tête : les deux agents avaient-ils posé la bâche exprès sur le tas de terre pour cacher leur bourde ?
* Le prénom a été modifié
